La catastrophe est aujourd’hui l’ultime promesse que nos sociétés semblent encore capables de tenir. Changement climatique, épidémie, attaque terroriste, on ne compte plus les « risques » et les « menaces ». L’objectif premier de ce livre est d’analyser les transformations sociales, politiques et ontologiques qui ont pu façonner un tel sentiment : les « risques » désignent moins des objets précis qu’une configuration sociale globale.
Pour conjurer l’ensemble de ces menaces, une nouvelle forme de « gouvernance » s’est aujourd’hui mise en place, que nous nommons la biopolitique des catastrophes. Elle se développe sous la forme d’une immuno-politique, qui tend à vouloir se protéger de toute atteinte, de toute altérité comme de toute altération. Et, pour le coup, de toute possibilité de changement politique. Plus grave encore : en voulant protéger, elle détruit. Elle alimente, renforce les dangers qu’elle est censée combattre. Et se révèle au final pour ce qu’elle est, une thanato-politique. Comment sortir de ce piège ?
En analysant avec précision les différentes technique de cette bio-politique et de cette immuno-politique, en allant débusquer le fantasme inconscient qui la travaille en profondeur, celui d’une indemnité absolue, d’une immunité totale. Voici l’étrange hypothèse que formule cet ouvrage : plus nous nous croyons immortels, plus nous nous auto-détruisons. Plus l’homme cherche à s’excepter du monde et du vivant, plus il détruit le monde, plus il accumule les dommages.
Pour sortir du piège immuno-politique, une seule solution : y renter résolument. Ce qui veut dire passer du statut d’exception à celui d’être en relations, ce qui veut dire être vraiment dans le monde, savoir vraiment que « nous sommes embarqués », et en tirer les conséquences : car la barque est fragile, et si l’immunité totale est dangereuse, rien n’empêche cependant de chercher les bonnes protections, celles qui permettent aux formes de vie de s’épanouir – après tout, seule une mince pellicule nous protège
du vide sidéral…
Ce passage de l’exception à la relation implique une relecture et une modification de la philosophie politique, qui doit se faire aujourd’hui, parce que l’époque l’impose, cosmo-politique. Sur le qui-vive, la philosophie politique ne peut plus se centrer sur l’homme, le peuple, etc., mais doit nous permettre d’agrandir notre regard et notre sensibilité à ce qui n’est pas humain. En définitive, ce livre est un appel lancé à l’extension de la politique au-delà du domaine de l’humain. Contre l’humanisme mondialisé qui a plié le monde à l’usage de l’homme au point de l’y laisser seul et mutilé, cet ouvrage tente de poser les fondements d’une capable de donner corps aux relations que les être humains tissent avec les non-humains. Afin d’éviter que la biopolitique des catastrophes ne devienne une politique catastrophique. Afin de remplacer la peur d’une interruption catastrophique par le désir d’une interruption politique.
Sommaire
« Qui vive ? »
1. Dela civilisation comme crash-test
Chronopathologie
Risques, dommages et catastrophes
Préventions, immunisations et protections
Pour une nouvelle image de l’être
Fantasme d’indemnisation absolue
2. Biopolitique des catastrophes
Légitime démence
Auto-perception du monde et nouvelle sensibilité
Les risques à l’ère globale
Naissance de l’hyper-biopolitique : prévention et précaution
Prophétie de malheur et politique-fiction
La Grande Conjuration : régulation, information et temps réel
Ecopolitique now !
3. Logiques de l’immun
Des protections redoutables
« Démocratie immunitaire »
« Auto-immunité de l’indemne »
Le Principe d’Indemnité
Protection, auto-organisation et continuité
La suspension des pulsions de mort : tolérance, intolérance, intolérable
Insulations cosmologiques en situation d’immanence
4. Insulations
« Sphéro-immunologie »
Sloterdijk et la théorie des sphères
Biosphère-Transphère 1
Noosphère-Transphère 2
Un « noyau sans écorce »
« Gâterie » et dégâts
Des 4X4 aux îles artificielles
La vie dans l’écume
5. Ecologie profonde – note sur Ecology, community and lifestyle d’Arne Naess
Un sommeil immunologique
Disciplines de l’oikos
La nature comme « champ relationnel »
La réalisation du soi
Deepecology
La « démocratie des formes de vie »
6. Les collectifs asymétriques de la Terre
Communauté trop humaine
Mondialisation de l’humanisme
L’impossibilité communautaire
Individuation de la Terre
Communauté profonde et « collectif en expansion »
Les collectifs asymétriques de la Terre
7. Qu’en faire ?
Du silence en politique
Le Capital comme appareil de capture
Extension de la politique
La traduction politique du différend
L’universel exsangue
Sur le qui-vive
La folie de l’être
La philosophie juste avant ground zero
Cosmologie profonde
Au pied d’un mirador
Catherine Guesde, Pauline Nadrigny
À partir de 14,99 €
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Editeur : éditions MF
Collection : Hors collection
Publication : 2 septembre 2008
Intérieur : Noir & blanc
Support(s) : Livre papier
Poids (en grammes) : 200
Langue(s) : Français
EAN13 Livre papier : 9782915794328