Pierre Gervasoni se penche sur Biotope, le dispositif sonore que Jean-Luc Hervé a imaginé et composé pour l'exposition La Fabrique du vivant au Centre Pompidou.
« Définies à partir de sons instrumentaux ou de sons concrets, les “populations” en activité dans Biotope sont au nombre de six et répondent aux noms de “bouches”, “cuicas” (petites percussions), “trombones”, “appeaux”, “flûtes” et ”tasses”. Elles se manifestent par des motifs qui épousent souvent le contour d’une accélération ou d’un ralentissement. [...]
Comme toute musique écrite, la partition de Biotope ne cesse donc de connaître de nouvelles interprétations. [...] En dehors des “gestes” et des “cris d’alerte”, l’œuvre comporte un troisième type d’événements sonores, qui se traduit à la fin d’un cycle de dix minutes par la diffusion d’une miniature électroacoustique durant quarante-cinq secondes.
On peut alors considérer la partition comme une suite de mouvements, au sens tant classique (les parties d’une symphonie) que cinétique (l’animation sur plusieurs plans). “C’est pour cela qu’elle s’appelle Biotope”, conclut Jean-Luc Hervé, attaché à “l’idée de créer un horizon un peu différent grâce aux sons”. Développée pendant dix ans, en extérieur, de Kyoto à Royaumont, en passant par Noirlac, cette aspiration a conduit à des « jardins sonores » qu’éclaire un passionnant échange entre Jean-Luc Hervé et la philosophe Anne Cauquelin, récemment publié dans un ouvrage enrichi d’une carte mémoire (Les Jardins de l’écoute, éditions MF). Une jolie formule y résume le credo du compositeur : "la musique comme aiguillon du voir”. Rien de plus judicieux que son expérimentation sur le terrain d’une exposition. »